Resumo
Themes majeurs des chants II et III de l'Énéide, "effondrement", "errance" et "dissimulation" dessinent, dans l'ouverture de l'épopée latine, l'espace-temps de la dissémination et de la dispersion des sens de la geste elle-même, telle que nous la raconte le héros, dans le miroitement de tous les feux de l'ironie humaine et divine: occupant le centre du récit, Enée y joue, à l'instar de son double grec, le rôle d'un narrateur qui souligne cependant perpétuellement ses distances d'avec Ulysse, héros de Nostos, d'un Retour à la Patrie, tandis que, s'égarant entre des fantômes dans une ville en flammes, Enée se perd et à sa patrie, et se meut, à partir de la chute de Pergame, inlassablement, dans une errance peuplée par des signes qui se prêtent toujours à des déchiffrements trompeurs, ouvrant et ouvrant de nouveau les portes de l'erreur et de l'errance, dans un parcours marqué par des fondations déceptives - à chaque halte, Enée croit avoir fondé une Rome qui se dévoile aussitôt simuIacre, trompe-l'oeiI, faux semblant. La scene qui clôture le deuxieme chant nous le montre d'ailleurs, et cela de façon vertigineuse et exemplaire, entre deux vides: Troie qui n'est plus, Rome qui n'est pas encore. Cet article est un essai de suivre le héros de Virgile dans le labyrinthe verbal du chant II et dans les errances/erreurs du chant III, à partir d'un épisode repris deux millénaires plus tard par Charles Baudelaire dans le poeme "Le Cygne", des Fleurs du Mal: deux visions de l'Histoire et du Texte se'lisent dans l'intervale qui unit, en les séparant, ces grands poetes.